mercredi 24 décembre 2014

Un conte de Noël

"Nicodème… et le cadeau de Dieu"

Conte de Noël 2014 (basé sur Mt 25, 14-30 ; Jn 3, 1-16)
Pascal LEFEBVRE / Veillée de Noël à Marmande, le 24/12/14.

Une prédication pour la veillée de Noël… ce serait trop banal !
Permettez-moi, ce soir, de déroger à la règle… et de rêver un peu.
Voici un conte de Noël qui nous livre le témoignage imaginaire d’un certain Nicodème… un personnage du Nouveau Testament qui a rencontré Jésus.
Vous y reconnaitrez certainement quelques passages bibliques inspirés de Matthieu (chap.25) et Jean (chap.3) :

Moi, Nicodème, je suis un vieillard, un Juif devenu Chrétien, disciple du Christ.
Si j’écris ces paroles, c’est que je veux laisser une trace de la rencontre que j’ai faite un jour avec un homme extraordinaire, qui a changé ma vie : Jésus de Nazareth.

Autrefois, j’étais un notable, un homme respecté de tous, pour sa sagesse et sa connaissance, un Pharisien, un expert des Ecritures, notamment de la Torah.
Puis un jour, j’ai croisé ce Jésus qui m’a parlé de manière nouvelle : de nouvelle naissance, de la possibilité de naître d’en haut, d’accueillir en soi l’Esprit de Dieu.

Au premier abord, je n’ai pas compris grand-chose de cet appel qu’il adressait. C’était pour moi du charabia.
Mais plus tard, j’ai eu d’autres occasions de croiser sa route. Et un jour, en écoutant une histoire, un parabole qu’il racontait : j’ai eu un flash. J’ai été littéralement saisi par ses paroles.

Ma mémoire n’est plus ce qu’elle était. Mais je veux bien essayer de vous la raconter et de vous expliquer – en même temps – comment j’ai compris cette parabole :

Il en sera – disait-il – du Royaume, comme d'un homme qui allait partir en voyage : Faisant confiance à ses serviteurs, il les appela et leur confia… leur donna… ses biens. Il remit à l’un cinq talents – une somme considérable –, à un autre deux, à un autre un seul – ce qui correspond quand même à 10 000 deniers : à 17 ans de salaires d’un ouvrier   il donna à chacun selon ses capacités ; puis il partit.

L’histoire commence comme ça… et c’est déjà étonnant. Je ne connais pas un seul maître qui distribuerait une telle somme, qui ferait une telle confiance à ses employés.

Aussitôt – nous dit la suite de l’histoire 16celui qui avait reçu les cinq talents s’en alla travailler, pour les faire valoir, les faire fructifier, et en gagna cinq autres. 17De même celui des deux talents, doubla également le don reçu et gagna deux autres talents.
18Mais celui qui n’en avait reçu qu’un seul, s’en alla creuser un trou dans la terre et y cacha l’argent de son maître.
Il agit ainsi parce qu’il avait peur. Il se disait en lui-même : « Recevoir un cadeau pareil, ce n’est pas possible… ce n’est pas normal ! Il doit y avoir un piège !
Un patron comme ça, ça n’existe pas ! On les connaît les patrons ! Il n’y a que le profit qui compte pour eux ! »
Alors, prudemment… ou plutôt, peureusement… il enterra ce cadeau… qui pour lui n’en était pas un.

19Longtemps après, le maître de ces serviteurs arrive.
Contre toute attente, il revient, pour lever avec eux une parole, pour faire le point avec ceux en qui il avait eu confiance, pour prendre des nouvelles, tout simplement.

Dès lors, les deux premiers serviteurs présentèrent les nouveaux talents qu’ils avaient gagnés, par leur propre travail :
20Celui qui avait reçu les cinq talents s’avança et en présenta cinq autres, en disant : “Maître, tu m’avais confié cinq talents ; voici cinq autres talents que j’ai gagnés.” 21Son maître lui dit : “C’est bien, bon et fidèle serviteur, tu as été fidèle en peu de choses, sur beaucoup je t’établirai ; viens te réjouir avec ton maître.”
22Celui des deux talents s’avança à son tour et dit : “Maître, tu m’avais confié deux talents ; voici deux autres talents que j’ai gagnés.” 23Son maître lui dit : “C'est bien, bon et fidèle serviteur. Tu as été fidèle dans des choses qui ont peu de valeur, je te confierai donc celles qui ont beaucoup de valeur. Viens te réjouir avec moi.”

Jusque là l’histoire se répète. On comprend que les deux premiers serviteurs se sont comportés comme des gérants fidèles vis-à-vis de leur maître.
En conséquence, c’est la joie qui leur est offerte. Ils ne sont plus considérés comme des serviteurs, ils sont désormais traités comme des fils… des enfants du maître.

A travers la réponse du maître, on apprend que son projet est de leur confier d’autres biens, de leur donner d’autres talents encore plus nombreux… puisqu’ils ont su recevoir les premiers et faire bon usage de ce qui leur avait été offert gratuitement.

Malheureusement, avec le dernier serviteur les choses se compliquent, car lui n’a pas du tout compris le projet de son maître :

24S’avançant à son tour, celui qui avait reçu un seul talent dit : “Maître, je savais que tu es un homme dur : tu moissonnes où tu n’as pas semé, tu ramasses où tu n’as pas répandu ; 25par peur, je suis allé cacher ton talent dans la terre : le voici, tu as ton bien.”

Le 3ème serviteur s’est complètement trompé sur l’intention de son maître.
Par crainte, il n’a pas fait usage de ce qu’il avait reçu. Il s’empresse alors de restituer à son maître le talent qui lui avait été donné.
En réalité, celui-ci n’a jamais cru au don. Il n’a pas reconnu la générosité gratuite de son maître.

Il avoue même qu’il voit en lui un homme dur, sévère et exigeant… une sorte de tyran.
On se demande bien pourquoi ?
Peut-être était-il mal renseigné ? Peut-être ne venait-il jamais au temple ?
Ce qui est sûr, c’est qu’il n’avait pas rencontré le Christ… sinon il aurait su… il aurait mieux connu l’intention véritable de son maître.

En refusant ce cadeau, ce serviteur n’a pas donc agi avec sagesse : Non seulement il pouvait vexer son maître… mais, en plus, il s’est carrément privé de ce qu’il avait reçu.

Le maître lui répondit alors : “Mauvais serviteur, paresseux ! Tu savais que je moissonne où je n'ai pas semé, que je récolte où je n'ai rien planté ? 27Eh bien, si tel était ta pensée, tu aurais dû placer mon argent à la banque et, à mon retour, j'aurais retiré mon bien avec les intérêts.

28Retirez-lui donc son talent et donnez-le à celui qui a les dix talents.
29Car à tout homme qui a (qui sait recevoir avec confiance), l’on donnera et il sera dans la surabondance ; mais à celui qui n’a pas (qui est incapable de recevoir et de faire confiance à un Autre), même ce qu’il a lui sera retiré.

La réaction du maître vous paraît peut-être injuste (?) Mais qu’auriez-vous fait, à sa place ?
Imaginez, pour Noël, que vous faites un beau cadeau à quelqu’un, et que cette personne le refuse… auriez-vous envie, par la suite, de lui offrir d’autres cadeaux, d’autres présents ?
Je ne le crois pas !
Vous seriez plutôt fâchés de constater que cette personne – en vous rendant votre cadeau – signifie qu’elle ne veut rien avoir affaire avec vous.

Ainsi donc, comme cet homme avait d’autres présents à distribuer, il décida de les donner à ceux qui avaient accepté de recevoir les premiers :
Il donna d’autres biens, d’autres responsabilités aux deux premiers serviteurs, car ceux-là avaient su recevoir ses dons avec confiance.

Sans doute, connaissez-vous cette histoire : elle est raconté dans un évangile.
Mais, peut-être, ne connaissez-vous pas très bien la fin.

La suite de l’histoire… je la tiens de ma propre expérience :

En réalité, le maître ne voulu pas en rester là.
Finalement, il se ravisa, il eu pitié de ce dernier serviteur. Il éprouva de la compassion pour lui.
Comment aurait-il pu le chasser sans lui donner une seconde chance ?

En secret, il décida de lui donner un autre cadeau, encore plus précieux que le premier.
Il lui confia carrément son trésor ultime, la perle de grand prix, ce qui était le plus précieux à ses yeux : son propre fils.

Il confia ce don inestimable… il offrit à l’humanité et notamment à cet homme son propre fils. Il le fit, afin de lui montrer son amour et sa confiance… afin que ce serviteur change enfin d’avis sur son maître : qu’il ne le considère plus comme un homme dur, mais un père bien-aimant et bienveillant... comme un père céleste qui prend soin de chacun de ses enfants et qui fait confiance à chacun de ses serviteurs, même les plus petits.

Moi… Nicodème, j’ai été témoin de cela.
En rencontrant ce fils – un certain Jésus de Nazareth – j’ai compris que cet homme… ce maître de la parabole, était en fait une image de Dieu.
C’est Dieu qui nous confie ses trésors : la vie, la création, la paix, la joie, la fraternité, la justice, le partage, et tant d’autres choses.

Il peut arriver que nous refusions ses cadeaux, que nous refusions la vie… à cause de mauvaises expériences… à cause de notre méfiance vis-à-vis de Dieu… ou à cause de nos peurs, des épreuves ou des souffrances, parfois trop lourdes à porter.

Il faut bien l’avouer : nous sommes des créatures angoissées.
Bien souvent, notre égo prend le dessus… nous voulons être notre propre maître. Mais, cela ne nous rend pas paisible et serein : cela créé en nous de l’inquiétude et de l’angoisse… car il faut se débrouiller seul… lutter, pour mériter sa place… se battre, pour construire son propre bonheur. 

Cette parabole – comme l’évangile – nous apprend que Dieu nous propose un autre chemin : celui de la confiance… en acceptant de recevoir la vie comme un don.

Pour nous montrer son amour, Dieu nous a offert son bien le plus cher : il a envoyé son Fils parmi nous, pour nous révéler son vrai visage : celui de l’amour… il l’a fait, parce qu’il nous fait pleinement confiance… parce qu’il veut que nous soyons libres et non angoissés.

Mais nous… que faisons-nous de ce cadeau, de cette grâce ?
Savons-nous l’accueillir dans notre cœur ce Fils qui vient nous révéler l’amour du Père ?

Quand j’ai compris cela, j’ai enfin saisi ce que Jésus m’a dit un jour, à moi, Nicodème le Pharisien : « il te faut naître d’en haut. Il te faut naître de l’Esprit :
Naître de l’Esprit, cela veut dire accueillir la lumière, le souffle de Dieu, dans ton cœur et te laisser transformer par son amour ».

Quand j’ai entendu cette parole, je ne l’ai pas comprise sur le moment. C’est bien plus tard que j’en ai perçu la portée… en voyant que ce Fils que Dieu a donné aux hommes… ceux-ci ne l’ont pas compris… il ne l’ont pas accepté et l’ont même fait crucifier. Mais, à nouveau Dieu s’est manifesté… en le ressuscitant, en le donnant à voir Vivant à une multitudes de frères.

Si je vous dis cela… c’est parce que je crois que rien n’est jamais figé dans la vie… il n’est jamais trop tard pour accueillir la Bonne Nouvelle de l’amour de Dieu dans son cœur.
Il est toujours possible de faire les bons choix, de se laisser guider par Dieu. On peut toujours lui faire confiance à n’importe quel moment de son existence.

C’est cela que nous fêtons à Noël… nous les Chrétiens… nous qui avons reconnu dans ce Jésus – cet enfant né dans une humble étable – le Fils de Dieu, l’envoyé de Dieu.

C’est un message de paix et d’amour qu’il nous apporte.

Grâce à lui, je crois au don, je crois à la Vie, je crois que nous sommes aimés de Dieu.

Je crois que notre vie n’est pas écrite dans les étoiles du ciel, contrairement à ce que disent les mages… qu’elle n’est pas fixée dans les livres ou les lois, contrairement à ce que pensent les religieux ou les fondamentalistes… qu’elle n’est pas non plus dictée par les rois et les puissants, contrairement à ce que croient les fatalistes ou les grands de ce monde.
Mais, je crois que cette vie nous est donnée, tout simplement, comme un cadeau de Dieu, comme cet enfant dans la crèche… offert, par amour.

J’ai écris ces paroles parce que j’espère qu’un jour nous vivrons tous ainsi notre vie, comme un cadeau de Dieu à partager, au-delà de nos différences de talents, de charismes, de richesses ou de faiblesses et de handicaps.

Car Noël… c’est cela : c’est laisser place au don de Dieu, c’est accueillir l’Esprit de Dieu et de son fils Jésus, dans notre cœur et notre vie, comme une grâce.

Recevoir cet Esprit d’amour, savoir que Dieu nous aime comme un Père, c’est cela qui nous rend pleinement libres et vivants ! Cela change notre mentalité, notre manière de voir la vie et les gens.
Les autres ne sont plus des individus isolés, des concurrents, des rivaux… contre lesquels je devrais lutter pour mériter ma place. Ce sont mes frères et mes sœurs, aimés de Dieu… et nous sommes inter-dépendants.
Ils sont là… comme je suis là… parce que la vie est un cadeau… parce que nous avons, chacun, reçu des dons particuliers à faire fructifier et à partager.

Voilà, je que j’avais à dire, moi, Nicodème…

Noël, c’est redécouvrir que la vie est un cadeau de Dieu… que le plus beau présent est l’amour qu’il nous offre… et que ce présent devient d’autant plus précieux que nous l’utilisons… que nous partageons les dons reçus avec nos frères et nos sœurs.

Joyeux Noël à tous !


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